Actualités 17 juin 2025

SPORT & INTERNATIONAL : Mobiliser les forces publiques et privées pour faire rayonner l’économie du sport français à l’international

Le sport français vit une dynamique inédite, propulsée par une série d’événements internationaux majeurs et par la volonté affirmée de structurer la filière comme levier économique stratégique. Dans le cadre de Sport Définition, cette table ronde a réuni des experts de premier plan pour dresser un état des lieux lucide des atouts et des faiblesses du sport business français à l’international, tout en explorant les opportunités concrètes à saisir. La complémentarité des regards – diplomatique, entrepreneurial, institutionnel – permet de dégager des pistes d’action claires pour faire de la France un acteur incontournable du sport mondial.

Image Sport & International

Le sport français à la croisée des chemins entre attractivité internationale, influence normative et ambition exportatrice

Samuel DUCROQUET, ambassadeur pour le sport au Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, a ouvert la discussion en identifiant trois leviers essentiels pour renforcer la place du sport français dans le monde : l’influence, l’attractivité et l’export. Les grands événements internationaux accueillis par la France – Jeux Olympiques, Coupes du monde, Tour de France – offrent une vitrine sans précédent pour projeter l’image d’un pays innovant et dynamique. Mais il s’agit désormais de capitaliser sur cette visibilité pour structurer durablement un écosystème compétitif. Cette ambition suppose de renforcer la capacité d’influence française dans la définition des normes sportives internationales, d’attirer davantage d’investissements étrangers sur notre territoire, et d’aider les entreprises de la filière à réussir leur développement hors de nos frontières. L’objectif n’est plus seulement de briller sur la scène sportive, mais de construire une véritable stratégie économique, industrielle et diplomatique autour du sport. Cette table ronde s’est ainsi inscrite dans une logique volontairement prospective, posant un regard lucide sur les forces en présence, les freins actuels et les leviers d’accélération.

 

Un écosystème entrepreneurial riche et innovant mais confronté à un manque critique de financement et de structuration

Jennifer D’HOIR, directrice des affaires publiques monde chez Sorare, a souligné la vitalité du tissu entrepreneurial français dans la sportech, marqué par une forte capacité d’innovation. Cependant, ce dynamisme se heurte à une difficulté récurrente : le financement. La majorité des fonds levés par les start-ups françaises du sport proviennent de capitaux étrangers, ce qui pose des questions de souveraineté. Jean-Baptiste ALLIOT, cofondateur de LaSource, a confirmé ce diagnostic en pointant la faiblesse du passage à l’échelle : si la France est performante dans l’amorçage, elle peine à accompagner ses entreprises dans la croissance. Cette carence s’explique par une structuration insuffisante du capital-risque dans le sport, mais aussi par une culture d’investissement encore timide, notamment chez les grands athlètes français. À l’inverse des États-Unis, où les sportifs deviennent souvent investisseurs, la France reste prudente, bridée par une vision du sport encore peu tournée vers le business. De plus, les entreprises françaises manquent parfois d’un « mindset international », tardant à se projeter hors de leur marché domestique. Les intervenants appellent donc à un changement de paradigme, tant dans la structuration des fonds disponibles que dans l’audace commerciale des start-ups elles-mêmes.

 

Mieux connecter les acteurs, structurer les réponses collectives et intégrer le sport dans les grandes stratégies économiques

Marie-Cécile TARDIEU, directrice générale déléguée de Business France, a rappelé que l’une des principales faiblesses du sport français réside dans la fragmentation de ses acteurs. Clubs, start-ups, grandes entreprises, fédérations, collectivités : chacun agit trop souvent en silo. Bpifrance a su créer, à travers cet événement, un espace fédérateur pour faire dialoguer ces mondes. Il faut maintenant pérenniser cette logique collaborative et faire du sport un pilier transversal des politiques économiques. Business France accompagne déjà les entreprises à l’international dans le cadre d’événements sportifs mondiaux, en connectant l’écosystème sport avec les infrastructures, les services, les nouvelles technologies et les expériences fans. Un autre défi est d’ordre normatif : la France doit peser davantage dans la définition des standards internationaux, notamment pour permettre à ses entreprises d’accéder aux appels d’offres des grandes instances sportives. Il s’agit de sortir le sport de son isolement sectoriel pour l’inscrire dans une dynamique de réindustrialisation, d’innovation et d’export. Pour cela, une stratégie collective et offensive est nécessaire, mobilisant à la fois les acteurs économiques, les décideurs politiques et les relais diplomatiques à l’étranger.

 

Le sport, un marché global sans frontières : penser mondial dès la conception pour capter le potentiel universel du secteur

La dimension universelle du sport constitue une opportunité stratégique majeure pour les entreprises françaises. Jennifer D’HOIR a rappelé que Sorare, bien que française, a conclu son premier contrat avec la Ligue belge et non avec un acteur national. Aujourd’hui, la majorité de ses utilisateurs et de ses revenus proviennent de l’international. Le sport est un marché sans frontières, porté par des valeurs universelles et une passion globale. Penser global dès la conception du produit est donc essentiel. Jean-Baptiste ALLIOT a ajouté que cette internationalisation doit être structurée : identifier les bons marchés, s’entourer de partenaires stratégiques, et bénéficier du soutien de l’État et de Bpifrance, qui multiplient les dispositifs d’accompagnement. Mais les entrepreneurs doivent aussi s’auto-mobiliser, développer leur réseau, s’implanter localement dans les zones stratégiques comme l’Arabie Saoudite, les États-Unis ou l’Australie. La Marketplace lancée par Business France constitue une réponse concrète pour améliorer la visibilité des entreprises françaises à l’international. Elle complète les initiatives diplomatiques telles que les « Clubs Sport », ces consortiums informels créés autour des ambassades pour fédérer les acteurs français sur des marchés porteurs.

 

Créer un élan collectif durable, entre volontarisme public, implication entrepreneuriale et diplomatie économique proactive

Samuel DUCROQUET a rappelé que les grandes réussites françaises à l’étranger ne sont pas des exceptions mais les fruits d’une expertise reconnue. Que ce soit dans l’organisation des événements, la formation sportive ou l’innovation industrielle, la France impressionne à l’international. Toutefois, il faut aujourd’hui aller plus loin en généralisant la présence française sur tous les grands salons, forums, compétitions et projets du sport mondial. La diplomatie économique joue ici un rôle clé en activant des réseaux, en identifiant des interlocuteurs stratégiques et en ouvrant des opportunités de marché. Pour cela, la collaboration entre l’État, les entreprises, les athlètes et les investisseurs doit se renforcer. Le sport français ne manque pas d’atouts : ses infrastructures, ses savoir-faire, ses champions et son dynamisme entrepreneurial sont autant de leviers à activer. Mais cela suppose aussi que les entrepreneurs changent de posture : ils doivent anticiper, se professionnaliser dans leur approche de l’export, s’outiller en advisors, et faire de l’international une stratégie, non une conséquence. L’union des énergies publiques et privées autour d’une ambition commune peut faire du sport français un véritable moteur économique à l’échelle mondiale.

Le sport français dispose aujourd’hui d’une fenêtre de tir unique pour s’imposer sur la scène internationale. Les atouts sont nombreux : innovation, attractivité, excellence organisationnelle. Les défis restent importants : financement, structuration, ouverture à l’international. Mais la dynamique est enclenchée. À travers la mobilisation des pouvoirs publics, l’implication croissante des entreprises, et le soutien de la diplomatie économique, une nouvelle ère s’ouvre pour la filière sport. Une ère où le business, l’influence et les valeurs s’allient pour faire rayonner la France à travers le sport.

 

Actualités 17 juin 2025